Reedereigeschichte Deutsch         Storia della compania         Company history english    
La fondation de cette entreprise a eu lieu en 1938 déjà et son but original devait être le financement de la navigation sur le lac de Lugano. Le siège de l’entreprise se trouvait à Glaris, mais la direction effective se trouvait à Lugano, à la Via Pretorio 7, très probablement dans le bureau de son premier président, le Dr. Waldo Riva qui y avait son bureau d’avocat. Plus tard, l’entreprise créa une succursale à la Seestrasse 61 à Zurich (près de la gare Enge). Le Dr. Waldo Riva (1905 - 1987) de Lugano, était un avocat bien connu, un politicien et un officier de l’armée et il était également membre du conseil d’administration de la Banco di Roma per la Svizzera, à Lugano. Il était en relation avec Angelo Anastasi et le Dr. Fontana. A. Anastasi était le vice-directeur de la Banca Unione di Credito in Lugano, et temporairement également Consul de Grande Bretagne.
Suite à l’éclatement de la seconde guerre mondiale et avec l’instauration du pavillon de haute mer suisse, la Nautilus SA s’est introduite dans le domaine maritime. Initialement la Nautilus SA a acquit le vapeur italien SEMIEN pour le superbe prix de 10 millions de francs suisses, achat effectué auprès de la compagnie Ignazio Messina & Cie, de Gênes, laquelle était internée à Dakar. Cette société d’armement maritime  est encore existante aujourd’hui et semble encore très active dans le domaine maritime. Monsieur A. Anastasi avait évidemment donné la première impulsion pour l’acquisition du LUGANO, mais, vu ses qualité de Consul, il voulu rester en arrière des transactions. Ses bonnes relations avec l’Angleterre ont cependant largement facilité le départ du navire du port de Dakar.

S/S LUGANO

Le s/s LUGANO durant la période du KTA, avec son identification de navire neutre sur la coque et la cheminée

Le 29-04-1942 le cargo LUGANO a été inscrit sous numéro 10 au registre des navires suisses. Avec son port de 9'200 tonnes, le LUGANO reste le vapeur suisse le plus important de cette période de la guerre. La Nautilius SA n’avait ni les moyens de s’offrir une expertise technique du navire ni ne disposait des fonds nécessaires au maintient et au fonctionnement du vapeur. C’est la raison pour laquelle la société conclut un contrat avec la SRAG, Schweizerischen Reederei AG, de Bâle pour le fonctionnement du navire. La SRAG demanda un crédit de fonctionnement de 2.5 millions de francs suisses pour la prise en charge de ce mandat et prit ainsi  assumé la gestion du personnel et technique du navire. Pendant la période de la guerre la gestion était assurée par le KTA à Berne (le Kriegs Transport Amt). Pour le premier voyage déjà, de Lisbonne à Gênes et retour, il a été nécessaire de débourser  CHF 898'604.-, et la même somme pour le transport vers Bâle.
Déjà en juillet 1942, l'ambassade de Suisse à Rome exprimait ses craintes que la Messina ne pouvait représenter la Nautilus SA sans que cela n’implique que les représentants suisses passent pour les hommes de paille de la Messina.
Le 03-07-1946, au port de Gênes, la Schweizerische Reederei rendit le LUGANO à la Nautilus SA qui put ainsi reprendre le vapeur à son propre compte. A la fin de la guerre le KTA restitua, pour un montant global de 3.55 millions de francs suisses,  les quatre navires au service de la confédération et ainsi la Nautilus repris ces unités, soit le SAENTIS, le ST. GOTTHARD et le CHASSERAL. Le quatrième, l’EIGER, a été repris par la SRAG qui le rebaptisa en CRISTALLINA. En juin de cette même année la Nautilus SA fit l’acquisition d’un vieux pétrolier américain qui a été inscrit sous le nom de CERTENAGO sur le registre suisse des navires.

Nautilus-Office-Genova

Les ancienne bureaux de la Nautilus à la Via Caffaro de Gênes, image de 2014 (archives de Swiss-Ships)

Depuis le printemps 1947 jusqu’en août 1949 la société d’armement italienne Messina représenta les intérêts de la Nautilus SA et de ses navires, comme si c’était sa propre entreprise, à un tel point que même le papier à lettres officiel portait le sigle de la Messina, ce que les autorités consulaires et le Département fédéral des affaires politiques (EPD) ont fait remarquer à plusieures reprises.
Après la restitution du LUGANO, la Messina remis le navire en service pour des passages sur une ligne vers l’Amérique du Sud et les Antilles, sans même prévenir les propriétaires ni les autorités helvétiques. Cette manière de faire était totalement scandaleuse et dommageables pour la Suisse et on peut dire que la Messina a utilisé de manière frauduleuse le droit du pavillon suisse. L’état déplorable du bord, sous l’égide de la Messina, a attiré l’attention des autorités à Berne. En avril 1948, la Nautilus SA vendit le LUGANO à la Messina  (devrait-on plutot dire rendit ?). L’activité principale de la société d’armement a encore ouvert une ligne vers l’Afrique de l’Ouest, la Nautilus-Line, une ligne que continua d’exploiter plus tard la Keller Shipping. En 1948 la Messina/Nautilus chercha à exploiter une ligne de Gênes vers les Indes, à l’initiative de la Nautilus ou à la demande de la Messina, on ne le sait pas. Le ST. GOTTHARD effectua en été 1948 un voyage vers l’Inde, jusqu’à Calcutta.

Flyer
Flyer de la ligne nouvellement constituée Gênes-Indes

En 1949, le syndicat Handelsgesellschaft,  à Bâle (mieux connue sous le nom de UTC, Afrikafahrern, Union Trading Company, qui exploite certains grands magasins au Nigeria et au Ghana) se plaint dans un courrier adressé au Département fédéral des affaires économiques à Berne à propos du navire à vapeur sous pavillon suisse, le ST- GOTTHARD,  de la ligne Messina de Gênes.
Le paquebot était arrivé à Lagos en janvier 1949 et le capitaine demanda à ce que UTC prenne en charge les dépenses portuaires de la société d’armement. Pour de bonnes raisons, toutes les agences établies à Lagos ne souhaitaient pas assumer ce mandat, même pas l’UTC. Deux ans plus tôt, à Takoradi, le capitaine du même paquebot avait supplié l’UTC de l’aider à régler les frais du port. En conséquence, l’UTC en a eu des mois de siddicultés pour recevoir l'argent de la Nautilus SA. Par conséquent, l’UTC a demandé une garantie bancaire, qui n’a toutefois pas pu être émise dans un délai aussi court. Le capitaine a demandé de l’argent à la communauté italienne locale pour tout au moins acheter de l’eau douce et poursuivre son voyage. Bien sûr, la colonie suisse à Lagos, mais aussi au Ghana, n’était pas heureuse que la bonne réputation de la Suisse ait été discréditée par un tel comportement. De toute évidence, la Nautilus n'avait aucun contrôle sur les machinations de la Messina.

En juin 1950, la compagnie de navigation a achetée à la GEN (Gestione Esercizio Navi) de Gênes le vieux vapeur TICINO, leur flotte passant ainsi à 6 unités. La GEN a probablement elle aussi attendu  longtemps pour se faire payer, et a elle aussi demandé au Gouvernement Fédéral de prendre des mesures pour limiter l’influence étrangère. De  fait la Nautilus SA a créé, en 1947,  une succursale à Gênes, rue Caffaro 12. Ce bureau, situé dans un emplacement privilégié du centre-ville, était dirigé par l'ancien commissaire du port suisse de la KTA à Gênes, Monsieur Christian Bach. Cependant, le KTA se plaignit auprès de l'EPD en mars 1948 que M. Bach utilisait encore de le papier à lettre portant le nom de la "Commissariat fédéral du port de Gênes".
La GEN (Gestione Esercizio Navi, Gênes) appartenait à l’empire des sociétés du Vatican et a été fondée en 1947 par la Banque du Vatican. Cette compagnie gérait de nombreux navires sous la houlette de Giulio Pacelli, un des neveux du pape Pie XII (1876 - 1958). Une seconde entreprise était la G.E.N.S. Gestione Esercizio Navi Sicilia avec siège à Palerme. Giulio Pacelli avait également une position de dirigeant auprès de la Banco di Roma. Dr. Waldo Riva quand à lui était le représentant en Suisse des Chevaliers du Saint Sépulcre de Jérusalem qui était directement sous la protection du Vatican. Il semble que Waldo Rivas, qui avait aussi des intérêts dans d’autres sociétés d’armement du Tessin, a joué de ses influences auprès du Vatican.

G.E.N. Funnel       G.E.N. Flag

Armoiries et pavillon de la GEN (jaune / blanc, les couleurs du Vatican)

En 1949, la Nautilus SA a été réorganisée, le président du conseil d’administration étant comme avant Angelo Anastasi, l’avocat Dr. med. Bixio Bossi (1896 - 1990) et Dr. Waldo Riva, tous deux conseillers (FDP et CVP).  Le Dr. Luigi Fontana a pris sa retraite et le capital social est passé de 50 000 à 500 000 francs suisses. La société Ignazio Messina a été mise de côté et destituée des navires. Bien sûr, la Messina a vu la chose avec des yeux complètement différents, comme elle le présente aujourd'hui sur son site Web.

Au cours de la crise coréenne, alors que les espaces maritimes menaçaient de se raréfier, le gouvernement fédéral a pris des mesures pour augmenter le tonnage suisse d’outre-mer de 60 000 tonnes, conformément à la loi sur la sécurisation de l'approvisionnement national de 1938. Par résolution des 17/21-11-1950, la Confédération a consenti des prêts d’un maximum de 75% de la valeur du navire.

Bien que Nautilus SA était déjà en difficulté financière en 1950, la Confédération a aidé ladite entreprise de transport maritime à éviter une éventuelle faillite et la perte des navires. La Confédération craignait également que la Banque de Rome à Lugano, et ses filiales, la GEE.N. n’aient trop d'influence sur Nautilus SA. En 1951, la Confédération autorisa la Nautilus à rembourser ses emprunts à la Banco di Roma, en accordant une garantie fédérale de six ans. Le financement de la Banco di Roma a été remplacée par des prêts de la Banque Populaire Suisse et du Crédit Suisse. Cela a permis de se défaire de la banque italienne et de la GEN.

En 1951, l’ancien cargo CHASSERAL et le pétrolier CERTENAGO ont été vendus; le pétrolier de janvier 1951 a obtenu un prix relativement intéressant. A cette occasion, la Nautilus SA a acquis un nouveau cargo grec d'environ 6 mois et le baptisa BADEN. Le prix d'achat du BADEN s'est élevé à 3,45 millions US$ (environ 15,0 millions CHF), donc déjà à la limite du supportable. Selon certaines rumeurs, cet achat aurait fait d’énormes profits du côté de Gênes, mais sans qu’on puisse savoir dans quelles poches ils ont disparu.

Déjà en 1949, Bixio Bossi avait appris, en tant que Conseiller aux États, que la Confédération recherchait désespérément des intéressés pour améliorer son crédit en lires  italiennes. Avec l'aide du gouvernement fédéral, la société Nautilus SA a commandé un nouveau navire spécialement construit pour les voyages en Afrique de l'Ouest auprès d’un chantier naval italien, pour une valeur totale de 11,05 millions de CHF. Grâce à cette action, le gouvernement fédéral a pu réduire son crédit en lires de 8,75 millions de francs en Italie. Cependant, il faut aussi mentionner qu’à cette époque, le même navire en Allemagne aurait coûté environ la moitié, mais qu’en raison de la crise coréenne, les taux de fret ont par ailleurs augmenté.

Les 2,3 millions de francs restants concernaient le moteur Sulzer d'origine. L’HELVETIA a été mis en service en juillet 1952 et a navigué sous pavillon suisse pendant 26 ans.

HELVETIA

Le HELVETIA au mouillage en Afrique de l’Ouest (Photo: E. Haldimann)

Déjà à l’époque de l'attribution du pavillon suisse à l’HELVETIA par le Conseil fédéral, il avait été vivement conseillé d'augmenter le capital social de l’armateur à 5,0 millions de francs. En juin 1952, le capital-actions ne s'élevait qu'à 500 000 francs, dont 40% pour le Conseiller aux États et le président de la compagnie de navigation, Bixio Bossi. Emilio Bianchi (un parent d'A. Anastasi) en détenait 30% et Angelo Anastasi, les 30% restants. Le conseil d’administration se composait maintenant de Bixio Bossi, président et Dr Bianchi (Waldo Riva et A. Anastasi étant partis). Déjà à cette époque, des fonctionnaires à Berne s'inquiétaient de la situation financière de l'entreprise. Les coûts d'acquisition extrêmement élevés des deux navires BADEN et HELVETIA ont déjà pesé sur le gouvernement fédéral avec 24,0 millions de francs. En plus, la Confédération a garanti pour 5,0 millions supplémentaires le remboursement de l’ancienne dette bancaire. Les actions étant nanties en faveur du gouvernement fédéral, le Contrôle Fédéral des finances suisse en supervisa la comptabilité et spécifia sur l'utilisation des excédents de bénéfices, qui devaient principalement servir au remboursement des emprunts bancaires. L'administration a également parlé d'achats plus importants. Malgré cela, une augmentation du capital social de la Nautilus SA n'a jamais été réalisée.

En 1953, la guerre de Corée a pris fin et, par conséquent, le cours du fret à chuté de manière significative et ont de plus en plus mis la compagnie de transport maritime de Lugano en difficulté financière.
Parallèlement, la Nautilus SA a été impliqué dans une importante affaire judiciaire avec la Messina, une affaire qui avait déjà débuté avec l'achat de LUGANO à l’époque de la guerre. Un tribunal arbitral a exigé un versement d'un peu plus de 3,5 millions de francs à la Messina. Lorsque la Nautilus SA a demandé un emprunt de 2,0 millions de francs au gouvernement suisse pour payer la Messina, le désastre s'est rapproché. Au lieu que ce soit Bixio Bossi qui s’occupe du cas,  le gouvernement fédéral a chargé le Conseil national tessinois Franco Maspoli (1908-1974), lequel faisait partie du Comité des Finances, de négocier avec la Messina. Il obtint que cette somme soit considérablement réduite, par une décision extrajudiciaire, à 2,1 millions de francs suisses.

Pour aggraver les choses, les contrôleurs financiers ont découvert qu’une somme de 106’000 francs, sortie de la caisse, n’avait pas indiquée dans les livres de comptes, mais directement versée aux actionnaires. La confiance dans la gestion de l'entreprise en a pris un grand coup et ce que devait décider maintenant le gouvernement fédéral,  c’était soit de lâcher la société à elle-même et l’envoyer à la faillite en toute certitude, ou de la remettre en des mains plus capables. Pas facile de répondre à cette question, d'autant plus que Bixio Bossi était impliqué, car il était aussi membre du conseil d’administration de longue date, le chef de l'entreprise et en même temps une personnalité importante et bien connue à Berne.

L’Administration Fédérale des finances a tenté de trouver une solution favorable pour le gouvernement fédéral en faveur de la société de transport maritime en difficulté. De manière significative, Max Iklé et Bernhard Müller ont traité avec la Nautilus. Le Dr. Max Iklé (1903 à 1999) a été directeur  de l’Administration des finances fédérales entre 1948 et 1956, plus tard, il était au conseil d'administration de la Banque Nationale Suisse et il était aussi le père de notre première conseillère fédérale, Madame Elisabeth Kopp. L'avocat Bernhard Müller (1921-2006) était chef du département juridique du Département Fédéral des Finances.

B.Bossi      M. Ikle

               Dr. Bixio Bossi, Conseiller aux Etats                   Dr. Max Iklé, devenu directeur de la BNS
(Photos "Zürcher Woche")

Les autorités fiscales étaient en contact avec la Transoceanique SA à Genève,  pour trouver, si possible, une solution suisse au problème. Cette société était contrôlée par Charles Keller (1900 - 1992), patron de la Keller Shipping AG à Bâle et propriétaire du nouveau cargo GENERAL DUFOUR. Cette société de transport maritime était proche de la banque privée genevoise Lombard, Odier & Cie et leur conseil d’administration avait formé tant Charles Keller que Messieurs Jean Bonna et Edmond Barbey, tous deux banquiers à Genève. Pendant ce temps et de son côté, Bixio Bossi a négocié avec un "groupe de chasseurs" qui avait également manifesté son intérêt pour la Nautilus. Apparemment, il s’agissait d’intérets étrangers et les chasseurs n’étaient que des hommes de paille suisses.
Lors d'un voyage à Gênes en août 1953, Charles Keller a rendu une visite de courtoisie au bureau de la Nautilus à Gênes, où il a également rencontré Bernhard Müller, de l'administration fédérale des finances. Au printemps de 1954, la Confédération s'est demandé si la Transocéanique SA serait disposée à reprendre le contrôle de la flotte de la Nautilus.

Le 01.07.1954, la Keller Shipping SA, à Bâle a pris en charge la totalité de la gestion technique et commercial des navires de la Nautilus SA. Dans cette acquisition, la Nautilus possédait cinq navires, le ST-GOTTHARD et le TICINO ayant été vendus au même moment, probablement à l'instigation de Charles Keller, tandis que l'HELVETIA, le BADEN et le SAENTIS ont continué pendant de nombreuses années sous les couleurs de la Keller Shipping. Selon une parution dans le Journal Officiel Suisse du 09-08-1954, le conseil d’administration de la Nautilus SA, maintenant composé de personnes de confiance de Charles Keller. Le nouveau président était Jean Ernst Bonna, suivi par Edmond Barbey et Charles Keller est devenu délégué. Quand à Bixio Bossi, il a été autorisé à rester au conseil, mais n'avait plus qu'une signature collective. En 1955, Transoceanique SA repris les actions et les navires de la Nautilus SA de Lugano.
L'aventure a coûté à la Confédération, probablement 19,0 millions de francs. Cela ne peut pas être encore déterminé aujourd'hui. De plus, la valeur de la flotte a été estimée rétrospectivement, à une époque où les taux de fret étaient dans les sous-sols. Les experts italiens ont calculé une valeur totale d’environ 10,0 millions de CHF alors que le gouvernement fédéral s'attendait à une estimation d'environ 20,0 millions de francs suisses, la flotte représentant 29,0 millions d'euros. Certains membres de la Coupole Fédérale (le Bundeshaus) ont certainement fait des grimasses. Cependant, il a convenu avec la Transocéanique SA que  le gouvernement fédéral payerait 12,0 millions de francs suisses pour les navires.

Charles M. Keller

Charles Marcel Keller-Gysin (Photo Strom + See)

En 1955, lorsque les cours du fret ont repris, mais que la Nautilus SA avait été rachetée de longue date, Bixio Bossi a regretté sa décision de craquer sous la pression de la Berne fédérale et de Genève. En 1956, il publia un exposé de 62 pages dans lequel il a accusé les deux fonctionnaires bernois, Max Iklé et Bernhard Müller, de fraude au détriment de la Nautilus SA. Il a largement distribué cette lettre au palais fédéral et à la presse. C'est ainsi que débuta la soi-disant "affaire Nautilus", qui devrait occuper les tribunaux et le public pendant quelque 10 années. Les deux responsables ne se sont pas laissé faire et ont poursuivi Bossi pour diffamation. Il semble qu'à cette époque, le "Die Tat" (le journal de la Migros, dont le fondateur, Gottlieb Duttweiler, était certainement très désireux de faire connaître cette histoire au public) avait joué un rôle déterminant dans la détection et la publication de cette affaire, que nos autorités avaient pu maintenir à couvert pendant des années. Le Conseil fédéral a mis en place une commission d'enquête fédérale présidée par Emil Schmid, juge en chef bernois, et Robert Grimm, du conseil d'administration de la Compagnie maritime Schweizeriche Reederei et du Dr. Heinrich Wachter, anciennement à la tête de la firme de commerce mondial Volkart Frères, de Winterthur.
Voici certaines des questions les plus importantes soulevées:

Le 23 octobre 1956, le Département fédéral des finances et des douanes contraint le conseiller fédéral Streuli à convoquer une conférence de presse afin de s’informer en détail sur cette affaire. Malheureusement, l’Office de la Navigation Maritime à Bâle n’a jamais été consulté ni sollicité pour des conseils en la matière.

Mieux que beaucoup de mots, le tableau du rapport d'enquête figurant ci-dessous montre la situation à l'époque des emprunts fédéraux au 18.02.1954:


Armateur

Prêt

Remboursement

En pourcent

Suisse-Atlantique

15'447'000.-

3'885'000.-

25,15 %

Alpina (SRAG)

15'562'462.-

300'462.-

1,93 %

Nautilus

24'035'109.-

---------

  ---     %

Suisse-Outremer

6'185'477.-

   910'477.-

14,72 %

Transoceanique (Keller)

4'900'000.-

1'600'000.-

32,65 %

Reederei Zürich (Migros)

12'000'000.-

1'200'000.-

10.00 %

La Nautilus SA ne pourrait pas être attribué à la Suisse-Atlantique pour des raisons purement commerciales, car celle-ci, exerçant principalement des activités dans le secteur céréalier, aurait eu des difficultés en reprenant une compagnie de navigation de ligne. L'Alpina avait ses propres problèmes, Suisse-Outremer était trop récemment entrée dans la branche et la prise de contrôle par la Migros n'était de toute façon pas envisagée. Il ne restait donc que la Transocéanique de chez Keller Shipping.
En février 1958, Au tribunal de District de Berne, a eu lieu le procès en diffamation Max Iklé et Bernhard Müller contre Bixio Bossi. Ce dernier a été condamné en première instance et un an plus tard, la Cour suprême de Berne a confirmé le verdict. Il avait manifestement commis beaucoup d’erreurs de gestion avec la Nautilus SA ; comme le principal témoin, Charles Keller, l’a dit, l'organisation était "catastrophique", l'état des navires était mauvais, les primes d'assurance semblaient avoir été payées deux fois plus que nécessaire, les fournisseurs faisaient des surtaxes spéciales (corruption) et la plupart des agents devraient être chassé "en enfer". En fin de compte, Keller a déclaré avec audace: "Sans moi et mon organisation, la Nautilus SA ne vaudrait rien aujourd'hui."

Lors d’une interpellation parlementaire en février 1958, le Conseil Fédéral a déclaré que, grâce à l'amélioration de la situation du fret, mais également grâce à la bonne et efficace gestion de Keller Shipping, la situation de la Nautilus SA se serait considérablement améliorée. En outre, les représentants de la nouvelle Nautilus ont déclaré que les pertes subies par le gouvernement fédéral sont en train d'être réparées.
En avril 1959, au nom de la Confédération, le parquet du gouvernement fédéral poursuivit Bixio Bossi pour fraude. Cependant, le 13-11-1964, il fut acquitté par le tribunal pénal de Berne suite à quoi le journal " Zürcher Woche" " écrivait dans un long article : "Le procureur fédéral reçut une gifle et le Conseil Fédéral s’est pris un coup avec un poteau de clôture ",  alors même que les fonctionnaires fédéraux étaient au courant des années durant de la situation précaire de la Nautilus. De toute évidence, on se doit de penser que cette affaire aurait pu être mieux réglée. Cependant, il est difficile aujourd'hui de juger de cette affaire; nous ne connaissons que mal les toutes les personnes responsables impliquées. Par exemple : Bossi était-il un grand naïf ou tout simplement un homme d'affaires rusé? Il ne fait aucun doute que Charles Keller était un renard intelligent, capable de faire de bonnes affaires pour Keller Shipping, augmentant considérablement sa petite flotte. Les fonctionnaires bernois n’ont pas eu tort de prendre leurs décisions, mais la Keller Shipping a fait ses preuves pendant de nombreuses années dans le transport de ligne à destination de l’Afrique de l’Ouest et du Portugal. Cependant, la tendance s'est inversée dans les années 90, mais c'est une autre histoire.

Le 17-02-1964, le capital-actions de la Nautilus SA Genève (c/o Keller Shipping, Bâle), d’un total de 500'000.- francs passe en mains de la  Transoceanique Suisse SA Genève.

SwissShips HPS, janvier 2019

Traduction: Pierre-André Reymond février 2019

Source: documents des archives fédérales, Berne

Addendum à Nautilus SA:

Suite aux recherches effectuées auprès des archives du canton de Glaris, on peut dire que Nautilus SA a été fondée le 23 décembre 1937 avec la première assemblée générale dans le bureau du notaire public de la Talstrasse 25 à Zurich.

Le premier conseil d'administration était composé de deux personnes :

- Ing. Giuseppe Ferrazzini, Lugano, Président
- Serge Colombi, Bellinzone

Giuseppe Ferrazzini était le représentant de la Società di Navigazione sul Lago di Lugano, cette société détenant la part du lion avec 96 actions, tandis que le reste, soit deux actions chacun, revenait à la Banca Unione di Credito, Lugano et la coopérative An der Halden de Zurich. Le financement, l'immobilier, mais surtout l'achat et la vente de navires de toutes sortes ont été inscrits comme buts de la société.

Le domicile légal de la société était sur la Hauptstrasse à Glaris (apparemment, les maisons n'avaient pas de numéros à ce moment-là), chez le Dr. jur. Rudolf Gallati (1880-1943), avocat et homme politique qui a occupé de nombreux postes, tels ceux de Parlementaire Cantonal, de Landamann (Président du Gouvernement Cantonal) et Conseiller d’État. Après sa mort en 1943, son épouse, la Dr. Christine Gallati-Dinner, a repris le mandat de la Nautilus.

À l'époque où la Nautilus SA est entrée dans l'activité maritime et a acquis le LUGANO, les actions de la société avaient déjà trouvé de nouveaux acquisiteurs et différentes nouvelles personnes siégeaient au conseil d'administration. Cependant, le lien avec la Banca Unione di Credito de Lugano a été conservé. Le conseiller d'administration Angelo Anastasi était également vice-directeur de cette banque. Lors de l'Assemblée Générale Extraordinaire du 10 juillet 1954, il a été décidé que la Nautilus SA se délocaliserait à Genève (reprise de l'entreprise par Charles Keller). Ainsi prit fin la domiciliation de la société à Glaris.

Décembre 2020 / Traduction PAR

Back